Les solutions d’assurance à l’international
Confrontées aux spécificités des obligations et pratiques locales, les entreprises ont tout intérêt à trouver des réponses à la fois adaptées à leurs besoins et conformes aux législations des pays concernés en matière d’assurance. Justement, plusieurs choix s’offrent à elles, des solutions les plus complexes aux plus simples, chacune présentant des avantages et des inconvénients. Tour d’horizon.
Le programme d’assurance intégré
Principe
La première solution d’assurance à l’international possible est le programme d’assurance intégré. Un programme d’assurance intégré se distingue par un pilotage centralisé par la maison-mère des instructions et des garanties de l’entreprise assurée et son assureur. Il se compose d’une police dite « master » et de polices locales dites « intégrées ».
La police master pilote l’ensemble des garanties et couvre les entités françaises et les entités des pays de l’EEE (Espace Economique Européen). Les entités locales, elles, sont couvertes par des polices locales émises en lien avec la police master, qui permettent à la fois d’élargir les garanties, de faire intervenir la police master en complément si nécessaire, par le biais du mécanisme de DIC/DIL*, d’intégrer la FINC (Financial Interest Clause)**, de respecter les règles du non-admis en matière de couverture des risques internationaux (voir article sur le sujet), et enfin de coordonner et donner une visibilité complète des programmes.
Attention, une entreprise ne peut se lancer dans un programme d’assurance intégré sans l’accompagnement d’un courtier disposant d’un réseau mondial. Un soutien indispensable pour mettre en place, suivre et coordonner un tel programme.
Avantages
Choisir de s’assurer à l’international via un programme d’assurance intégré présente plusieurs avantages. D’abord, il offre une parfaite maîtrise des risques et des assurances, ainsi qu’une conformité légale et fiscale à la fois dans les pays d’implantation et le pays d’origine. Et puis, en cas de sinistre, le programme d’assurance intégré prévoit une indemnisation locale.
Cette solution d’assurance à l’international permet également une mutualisation des garanties au niveau du groupe et des économies d’échelle sur les primes. Autre avantage : avec ce dispositif, l’entreprise a accès à une information continue, via des reportings, une consolidation des informations et une répartition de la charge financière. Il donne par ailleurs le droit de recourir au mécanisme du DIC/DIL via la clause FINC, et offre une visibilité complète des programmes grâce à la coordination.
Contraintes
Les avantages du programme d’assurance intégré sont donc nombreux. Mais comme chaque solution, il existe aussi des contreparties.
En l’occurrence, il faut savoir que toutes les structures ne sont pas prêtes pour mettre en place un programme d’assurance intégré à l’international. En effet, un tel programme exige une certaine maturité du process de contrôle centralisé.
Une solution pour les grands groupes
C’est pourquoi cette solution convient davantage aux groupes disposant d’un nombre important d’implantations, et dans lesquels toutes les décisions se prennent au siège. Les différentes filiales ne font qu’exécuter la stratégie définie centralement, y compris en matière de gestion des risques et d’assurance. Elle convient également aux groupes qui n’en sont pas encore à ce stade, mais ont une forte volonté d’intégrer les problématiques d’assurances et un contrôle centralisé.
Le programme d’assurance coordonné
Principe
Contrairement au programme intégré, le programme d’assurance coordonné est totalement décentralisé. Les différentes polices émises localement n’ont aucun lien de réassurance avec la police de la maison-mère. C’est ce que nous appelons des polices « standalone ».
Les polices standalone sont souscrites par une filiale dans son pays d’établissement, indépendamment de toute couverture souscrite par le groupe auquel elle est liée. Cette dernière est alors assurée comme si elle était une entreprise indépendante. Dans cette situation, il existe donc une multitude d’assureurs, de courtiers et de polices avec des franchises inégales selon les pays.
L’entreprise peut, parfois, en complément, négocier avec l’assureur de la société mère une clause DIC/DIL (Diffrence In Conditions/Difference In Limits). Dans cette configuration, il est toutefois difficile d’obtenir de l’assureur de la maison-mère qu’il accepte d’intervenir en DIC/DIL car il ne maîtrise pas les « wording » locaux. Il doit donc les étudier et les valider un par un, le cas échéant. La police master est alors un chapeau qui couvre a minima cet ensemble non homogène, ou une partie seulement. La notion de « programme » est d’ailleurs purement mercatique.
Un programme d’assurance dit « coordonné » ne peut être considéré comme un programme d’assurance international. A ce titre, dans le cadre de ses réflexions, le groupe de travail de l’AMRAE a opté pour la définition suivante :
“Un programme international d’assurance est un dispositif d’assurance mis en place par une entreprise internationale, composé d’une police d’assurance “master» (ou “chapeau») souscrite par la maison-mère et déclinée à travers des polices locales.»
Partant de cette définition – qui peut être discutée – sont exclues les polices uniques (encore appelées polices globales), émises par une maison-mère, dont le périmètre ou la territorialité sont mondiales, mais qui n’ont aucun relais au niveau des polices locales.
Avantages
Le programme d’assurance coordonné présente des avantages certains. D’abord, il permet à chaque filiale de gérer les polices locales. Et puis, il prend en compte les besoins locaux, et implique des contrats rédigés dans la langue des pays concernés.
Contraintes
Plusieurs inconvénients, en revanche. Pour la maison-mère, un programme d’assurance coordonné signifie un contrôle et une visibilité limités. De plus, les garanties locales sont parfois insuffisantes par rapport au besoin d’un groupe, et le suivi et la gestion des risques peuvent s’avérer difficiles, avec des pertes d’informations importantes. Un tel programme exige donc un important travail de coordination, et des coûts additionnels liés à la coordination du programme qui seront supportés par la maison-mère in fine.
Adapté en cas de faible internationalisation ou centralisation
Du fait de ces avantages et inconvénients, cette solution est donc conseillée pour les groupes peu développés à l’international, ou sans contrôle centralisé.
La libre prestation de service
Principe
Les programmes d’assurance intégré ou coordonné concernent les pays d’implantation situés en-dehors de l’Espace Economique Européen (EEE). Au sein de l’EEE – qui comprend l’Union Européenne, l’Islande, la Norvège et le Lichtenstein –, c’est en effet le régime de la libre prestation de service (LPS) qui s’applique.
Ce régime autorise un assureur à couvrir un risque se trouvant dans un Etat membre de l’EEE, sans émission de police locale.
Avantages
Bien moins complexe à mettre en place que le programme d’assurance intégré ou le programme d’assurance coordonné, la libre prestation de service permet des coûts réduits pour l’entreprise. Par ailleurs, le contrat est rédigé en français, et n’oppose donc aucune difficulté particulière en matière de barrière de la langue. Enfin, elle offre des garanties uniques, conformes aux demandes de la maison-mère.
Contraintes
Si la mise en place et le suivi sont simplifiés, en revanche, la gestion des sinistres, elle, est complexifiée. En effet, la libre prestation de service peut engendrer des difficultés de communication entre le pays où s’est produit le sinistre et le pays d’origine, et aussi des pratiques divergentes qui compliquent les échanges.
La LPS, c’est aussi l’absence de service de proximité pour les filiales. Et un risque accru de « trou de garantie ». Cela peut se produire quand le texte de la police correspond au marché de l’Etat de souscription et non à tous les pays de l’EEE. Cela entraînerait alors une double sanction : une absence de couverture et une défaillance réglementaire.
Forte internationalisation, maison-mère centrale
La libre prestation de service est à privilégier pour des branches nécessitant peu ou pas de gestion locales (Directors & Officers, Individual Accidents), ou lorsque l’assuré pratique une activité avec une faible fréquence de sinistres, et/ou une franchise importante (peu de sinistres à gérer hors des frontières).
DIC/DIL et FINC : explications
*DIC/DIL : Difference In Condition / Difference In Limit : cette clause permet de combler les insuffisances des polices locales intégrées (qui sont en « good local standard ») aussi bien en termes de conditions de garanties (DIC) que de limites de couvertures (DIL). Elle permet ainsi une indemnisation complète de tout sinistre en excluant tout impact local sur les comptes consolidés du groupe pour les territoires où la police master peut intervenir.
**FINC : Financial Interest Clause : cette clause permet d’indemniser la maison-mère du sinistre subi par une filiale quand on a recours à la police master en DIC/DIL. En effet, certaines législations interdisent l’indemnisation d’une entité locale par un assureur étranger, sous peine de sanctions, fiscales en particulier.